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Arrêtés anticoupure : la justice à contre-courant des maires

La nouvelle loi sur la délinquance veut faire des maires des shérifs, et quand ils font les Robin des Bois, patatras ! ça ne marche pas !

http://www.liberation.fr/actualite/societe/225036.FR.php
Le tribunal administratif de Nantes jugera de la légalité de ces mesures.
Par Nicolas de la CASINIERE, Libération : samedi 23 décembre 2006
Nantes de notre correspondant
Les arrêtés municipaux contre les coupures d'eau et d'électricité ne passeront peut-être pas l'hiver. A la demande d'EDF et des préfets de la Loire-Atlantique et de la Sarthe, le tribunal administratif de Nantes a requis vendredi leur illégalité. Il rendra son jugement fin janvier.


L'audience faisait suite à l'arrêté pris le 30 mars 2005, par le maire communiste d'Allonnes, une ville ouvrière de près de 13000 habitants en périphérie du Mans (Sarthe), arrêté interdisant, dans le ressort de sa commune, toute expulsion, et toute coupure de gaz et d'électricité à l'encontre des familles en difficulté économique et sociale. La commune compte 15 % de chômage, 50 % de logements sociaux, 60 % d'habitants exonérés totalement ou partiellement d'impôts locaux et 378 familles allocataires du RMI. «En plus du motif social, évident, de droit au logement, au courant, à l'eau, c'était aussi une raison de sécurité, déclare le maire, Yvon Luby.
Une dame venait de mourir dans un HLM incendié, parce que, le courant coupé, elle s'éclairait à la bougie. Depuis cet arrêté, la
concertation est très étroite entre EDF et le centre communal d'action sociale. 69 dossiers d'impayés ont été traités en 2004 avant les arrêtés, contre 113 l'an dernier, et 133 en 2006.»
Stricte.
Le 4 avril 2005, la municipalité communiste de Trignac, près de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), avait voté de semblables arrêtés, traduits hier lors de la même séance du tribunal administratif de Nantes. Le commissaire du gouvernement (qui est chargé de dire le droit) y a vu un «excès de pouvoir» des maires, «incompétents à intervenir lors de différents de contrats de distribution d'électricité relevant du droit privé». Quant aux menaces à l'ordre public, «de par leur imprécision, leur éventualité», elles ne pourraient justifier juridiquement de tels arrêtés. Le magistrat a tenu à préciser qu'il développait là une analyse stricte, une solution de droit, qui peut «ne pas paraître juste ou équitable».
Discrets, les deux représentants d'EDF ont préféré ne pas développer leurs arguments oralement, s'en remettant à leurs conclusions écrites et disparaissant avant la fin de l'audience. «Pour annuler ces arrêtés pris à l'unanimité, toutes couleurs politiques confondues, on nous oppose des textes antérieurs à la loi de cohésion sociale de Jean-Louis Borloo. Loi qui intègre l'interdiction des coupures d'eau ou d'énergie pendant l'hiver pour les personnes en difficulté, rétorque Jean-Louis Le Corre, maire de Trignac. Même si les gens qui sont en dessous du seuil de pauvreté ont besoin d'un toit, d'eau et de courant à toutes les saisons.» «Comment une famille en difficulté pourrait-elle conserver les aliments, souvent donnés par les Restos
du coeur, sans un réfrigérateur ou un congélateur qui marche ? renchérit Yvon Luby. La loi n'existe que parce que la pauvreté
augmente. Et EDF n'agirait pas ainsi si c'était resté un vrai service public. Mais même dans une logique libérale, EDF récupère ses billes.»
Filtré.
La négociation fait des abonnés au gaz et à l'électricité des gens responsables et pas coupables, assumant en les échelonnant leurs retards de factures : «On paye en plusieurs fois. Avant, ils voulaient rien savoir. Ils nous coupaient, c'est tout. Même avec des enfants à charge, il n'y avait pas de discussion», commente une membre de l'Apeis 72, association sarthoise de chômeurs (1), qui a fait le déplacement jusqu'au pied du tribunal administratif, dont l'accès était strictement filtré par la police.
(1) Association pour l'emploi, l'information et la solidarité
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«Il faut qu'EDF joue son rôle»
Par Nicolas de la CASINIERE
Gilles Leproust, adjoint au maire d'Allonnes (Sarthe), explique les raisons pour lesquelles cette municipalité communiste a pris un arrêté contre les coupures d'eau et d'électricité : «Cet arrêté a cassé un certain mur du silence. Certaines familles ont tendance à se replier sur elles-mêmes, se sentant abandonnées quand le RMI ne couvre pas le loyer qui tombe en même temps que la quittance d'eau et celle d'électricité. Cet arrêté a montré que le Fonds social énergie, financé par EDF et le conseil général, n'était pas sollicité à plein.
L'arrêté a aussi obligé EDF à travailler étroitement avec nous. Il faut qu'EDF joue son rôle, même si le changement de statut accentue la recherche de profits.»

Version imprimable | (In)justice | Le Mardi 26/12/2006 | Lu 985 fois



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