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En route pour le Forum Social Nigérien, la caravane des alternatives sociales, et le Forum Social du Bénin...

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Les mises à jour y sont plus fréquentes que par mail... Bonne visite... Zoul -- En route pour le Forum Social Nigérien, la caravane des alternatives sociales, et le Forum Social du Bénin...

On the road again... Certes, mais quelque chose a changé. Je ne prends plus la route pour le plaisir de prendre la route. De plus en plus souvent, ce sont des événements et des rencontres qui me poussent à partir. Cette fois-ci, après 6 mois à travailler en France dans une association de lutte contre le sida, c'est le désir de connaître de nouveaux pays qui m'a remis sur la route. Au cours de mon voyage au Canada, pour assister à la conférence mondiale sur le sida à Toronto, je rencontrais le camarade Moussa Tchangari, dont le nom était déjà familier à mes oreilles, mais que je voyais alors pour la première fois, lors des journées Alternatives, organisées dans la campagne québéquoise à quelques centaines de kilomètres de Montréal... Moussa Tchangari, un des leaders d'un mouvement social nigérien puissant, qui, malgrè le contexte de misère (le Niger est régulièrement classé dernier au classement de l'indice de développement humain calculé par le PNUD), arrive à faire sortir des centaines de milliers de personnes dans la rue, pour s'opposer aux mesures assassines du Fonds Monétaire Internationale et de la Banque Mondiale.

Comment dans un tel contexte mobiliser les populations, informer, sensibiliser et passer à l'action? Tandis que ce débat commençait à voir ses limites du côté du Mali, où malgré les efforts de certaines organisations, la lutte avait trop tendance à demeurer la chasse gardée de quelques intellectuel(le)s, j'avais envie d'aller me confronter aux acteurs de ces mobilisations, à commencer par le Groupe Alternative et le Réseau du Niger contre la Dette et pour le Développement, qui organisaient coup sur coup le deuxième Forum Social Nigérien, ainsi qu'une caravane des alternatives sociales qui parcourerait le Niger de Niamey à Agadez... Ma rencontre avec le Niger, je la dois d'abord au Che africain, Souleymane « Che » Cissé, ce jeune leader des mouvements estudiantins, que j'avais pu découvrir en 2004 au Mali, lors du 3ème Forum des Peuples de Kita, une de mes premières rencontres « altermondialistes » sur le sol africain... J'avais appris son décès des suites d'une grave maladie l'an dernier, et bien qu'absent, je sens encore sa flamme communicative briller dans le regard de ses camarades.

Quitté le boulot, quitté la France et son haleine raciste, quitté les militants de Cachan, quitté les résistances africaines à Paris, pour un petit séjour en terre africaine, pour apprendre toujours plus, et comprendre les mécanismes qui font aujourd'hui le changement social en Afrique.

Retrouvailles fortuites. Arrivé après minuit à l'aéroport, Moussa m'a oublié. Il a 1000 choses à régler et à penser et je ne lui en veux pas. Un coup de fil et il rapplique. Nous passons devant le siège d'Alternative, qui est calme à cette heure tardive. Il me dépose ensuite non loin de là, à l'auberge Tatayi, où je vais passer ma première nuit dans un dortoir collectif, mais seul en cette période peu touristique dans ce pays bien peu touristique... Au petit matin, je retrouve la rue africaine, sa poussière, son trafic, et son goudron parsemé de trous. Les vendeurs de fruits sur le bas-côté n'ont pas changé de place. Les dêchets aussi sont toujours là et encombrent les quelques canalisations qui bordent les routes...

Je marche le long de la route pour rejoindre la radio, et suite à de mauvaises indications, je me retrouve face à un gardien qui m'explique que je ne suis pas au bon endroit. La maison qui fait face laisse apparaître une pancarte qui dit : RJDH- Niger. C'est le siège du réseau des journalistes pour les droits de l'homme. Je rentre voir ce qui s'y passe. A l'accueil, on me dit que seul le président est là, et l'on me conduit à son bureau. Je commence donc à m'entretenir avec Abdouramane Ousmane, son visage m'est familier, on a dû déjà se croiser lors d'un forum au Mali sans doute, mais je n'en suis pas sûr. Nous parlons de Survie, de François-Xavier Verschave, du CADTM et surtout de la situation des journalistes au Niger dont la situation est difficile : trois confrères sont emprisonnés actuellement par le régime en place qui vit une période particulièrement critique, suite à la découverte de nombreux cas de corruption au plus haut niveau, et à un blocage des institutions internationales qui ne souhaitent pas financer de nouveaux programmes tant que l'argent détourné n'est pas restitué. Nous finissons par échanger les contacts, et il se propose de m'accompagner au siège d'Alternative, où lui même prévoyait de se rendre. Je m'étonne des ses deux adresses emails à Netcourrier et Caramail, deux boites particulièrement mal adaptées à l'Afrique, puisque bondées de publicité et d'images lourdes à charger, rendant la consultation des courriers pénibles et fastidieuses. Il me répond qu'il utilise aussi une boite « cooperation.net » et ajoute : je crois d'ailleurs que c'est toi qui me l'a ouverte au Forum Social Mondial de Porto Alegre. Et effectivement, c'est bien là que nous nous étions rencontré pour la première fois, lors de ma première mission avec Ynternet.org, où nous formions des acteurs sociaux africains à l'utilisation des Nouvelles Technologies. Nous évoquons quelques souvenirs de ces échanges, je lui raconte mes premières missions africaines au Togo, au Burkina et au Gabon avec Cooperation.net, et nous partons pour Alternative. Finalement, ce projet, bien que comportant de nombreux défauts dans sa mise en oeuvre aura permis à de nombreux mouvements sociaux de s'approprier avec de bonnes bases l'outil internet, et même si les objectifs fixés au départ n'ont dans l'ensemble pas été atteints, il est certain que nous avons participé à la vulgarisation de l'email en Afrique, et je m'en réjouis aujourd'hui. Moussa Tchangari aussi utilise toujours aujourd'hui sa boite coopération. Je penserais à mon retour à m'assurer une nouvelle fois que le service va perdurer longuement pour permettre à tout ceux qui l'utilisent de continuer...

Alternative Niger. Arrivé au siège, je retrouve d'autres amis croisés à Kita ou lors du Forum Social Mondial de Bamako. Nous échangeons sur les affaires politiques du pays, sur la famine de l'an dernier et sur les mouvements sociaux contre la vie chère qui ont mobilisés tout le pays en Mars 2005. Je visite ensuite les lieux : le studio radio, le cyber, la salle de réunion, et finit par m'installer dans la salle internet, qui dispose d'une des rares connexions internet permanente du pays, un 128ko dédié, pour faire la connaissance de Kimba, un jeune informaticien nigérien en stage depuis quelques mois ici, et qui s'occupe des sites internets du groupe. Il travaille actuellement sur le site du Forum Social Nigérien, qui est sous spip, et il est ravi de recevoir quelques coups de main... Nous parlons d'Africa Computing, qu'il connait, mais qu'il n'utilise pas encore. Le président du Réseaux des Jeunes pour les Nouvelles Technologies nous rend visite. Ce réseau s'est créé suite à la formation organisée à Niamey par Africa Computing en Janvier 2003, et le jeune homme est ravi de recevoir des nouvelles des formateurs qui avaient laissés un si bon souvenir au Niger... La connexion possède un débit suffisant pour avoir une conversation téléphonique par Skype de façon agréable. Je parle ainsi avec ma femme, qui reste en France pour poursuivre ses études, mais avec qui je peux maintenir le lien quotidiennement grâce à internet : ça aide à supporter la séparation. Par ailleurs, nous allons essayer de diffuser la radio alternative en permance à travers le monde sur internet. Théoriquement, cela est possible, il reste à effectuer des essais ces prochains jours...

Alors que je fais connaissance des « militants » du groupe Alternative, nous en profitons pour visionner le film sur le contre-sommet de Bamako, celui qui s'était déroulé en Décembre 2005, en contrepoint à celui des chefs d'états Afrique-France, et sur lequel nous travaillions avec Fabrice de Survie depuis lors... Une version de 17 minutes, appelé « J'ai honte de la politique de la France en Afrique », a été montée par l'association Mapamundi en échange de la réalisation de leur site internet... Le film donne bien à ressentir l'ambiance du contre-sommet et plait aux camarades du Niger. Nous décidons ensemble d'organiser dans le cadre des activités du FSN une séance de projections avec ce film, ainsi que les deux films réalisés l'an dernier par Armand : « Paroles de Fana(s) » et « Quand Sankara... ». Nous projetterons aussi, comme au FSM de Bamako, quelques films zapatistes, et des productions locales...

Nous apprenons alors que le gouvernement, via le ministre de l'intérieur vient d'envoyer un courrier annonçant qu'il ne laisserait pas le forum se tenir sur le sol nigérien. La nouvelle est rude pour toute l'équipe, mais l'on s'y attendait, et la mobilisation s'organise aussitôt. Une réunion du comité organisateur a lieu le lendemain matin à la première heure et une réponse sera donnée par voie de presse. Le reste de la journée se passe tranquillement derrière l'ordinateur, à travailler sur le site du FSN, à échanger sur la situation du Niger et vient le soir, où tout le monde disparaît pour la rupture du jeûn. Moussa m'invite chez lui, où je fais connaissance de sa femme et de ses enfants, et où nous dégustons la meilleure pintade de Niamey, accompagnée d'une sauce délicieuse préparée par sa femme.

Conférence à l'université. Nous ressortons vers 20h30 pour nous rendre à l'université du Niger où une conférence doit avoir lieu pour informer les étudiants sur les défis et les enjeux du Forum. Moussa est très connu et apprécié là-bas. Alors que le campus me semble accueillant et verdoyant, on m'explique l'état avancé de dégradation des lieux, et les conditions épouvantables de travail. Il faut dire que j'ai connu le campus à Lomé et Bamako, et qu'il est difficile de faire pire. Les cours ont repris la semaine passée, et la fête de la korité devant se tenir le dimanche, les étudians présents sur le campus sont peu nombreux. Cependant, l'ampithéâtre extérieur est à moitié plein quand commence la conférence. Je pense qu'il n'y a pas un étudiant qui n'est pas venu assister à la conférence de Moussa. La présentation est rapide, et l'on parle de la réaction du gouvernement, on se rappelle ceux qui se sont battus pour obtenir le droit constitutionnel de se réunir en association et pour le droit d'expression. Finalement, après quelques questions et réponses, on se sépare sur la promesse de se mobiliser pour faire du forum un grand succès... Au retour, Moussa s'inquiète que je n'ai pas encore fait mon visa. Il me dit de me préparer à une évenutelle expulsion, ce qui a déjà été le cas d'une volontaire canadienne : je lui explique que ça m'est déjà arrivé au Gabon, et ça le fait bien rire. M'enfin, la perspective de se faire expulser d'Afrique et de ne pas assister aux événements pour lesquels je suis venu ne m'enchante guère. J'irai à la première heure m'en occuper le lendemain matin, et éviter un éventuel refus...

La prudence s'impose. Alors que la réunion du Comité Organisateur suivi d'une conférence de presse doit être en train de se dérouler à Alternative, je suis malheureusement obligé d'accomplir les formalités pour le visa. Tout se passe bien, mais ça prend du temps, et le temps de retirer de l'argent à la banque d'à côté, la matinée est déjà bien avancée. La fête de la Korité, de fin de ramadan, est pour demain et tous les taxis sont pleins. Je patiente sur le bord de la route, et marche sous le soleil pendant une bonne demi-heure. Heureusement, un type sympa s'arrête alors que je fais du stop. Il est militaire et me pose un peu trop de questions sur les raisons de mon séjour. Je parle de tourisme, d'amour de l'Afrique, de visites du pays. Finalement, le type semble sympa et m'invite pour le lendemain à passer à la fête qu'il organise chez lui. J'irai sans doute y faire un saut, en restant prudent sur les activités qui m'amène ici en réalité. Il me dépose à la station service non loin d'Alternative, où les gens se sont dispersés. Une partie de l'équipe est partie rendre visite à un journaliste emprisonné à 180 kilomètres de là. J'aurai pu être du voyage, mais suis arrivé trop tard malheureusement. Je sens une grande fatigue m'envahir avec la chaleur, et décide donc de rentrer me reposer à l'hotel, après avoir tout de même répondu à quelques emails... J'achète au passage quelques fruits et melons que je déguste avec joie, avant de m'allonger deux bonnes heures pour une sieste indispensable pour survivre aux 40° qu'il fait dehors depuis hier. Vers 18h00, je sors sur la petite terrasse de l'auberge, et commence à écrire un article sur la situation politique au Niger. Il fait chaud et je ne me sens pas très bien, je décide de retourner dans la chambre me passer un peu d'eau sur le visage. Quand j'allume la lumière, je tombe nez à nez sur un nigerien, debout face à mes affaires, torse nu, une brosse à dent dans une main, 55 000 CFA dans l'autre. Flagrant délit. Je lui intime de me rendre immédiatement l'argent, ce qu'il fait. J'appelle le gardien qui constate la situation. Mon voleur est calme et ne tente rien pour s'échapper, il se contente de nier l'évidence. Tandis que je vérifie si rien ne manque, je lui demande de rester à côté afin qu'il ne voit pas où j'ai mis le reste de l'argent. Ce voyou, qui est client du dortoir d'à côté, et qui partage donc la même salle de bain en profite pour filer en douce, en laissant ses affaires dans la chambre, dont son sac et sa pièce d'identité. On retrouvera dans ses affaires deux boites de Bactrim, que j'ai amené pour remettre à une association de séropositis de Niamey, ainsi qu'un préservatif de la marque de ceux que j'ai amené pour distribuer aux associations de lutte contre le sida de la place. Le vol est indéniable, et j'ai même l'impression qu'il a du prendre ça la veille... Je venais de retirer le matin même plus de 600 euros qui devait constituer l'ensemble de mes frais pour les deux mois à venir : on peut dire que j'ai eu de la chance, le voleur n'aura emporté « que » 20 euros et 20 000 CFA, soit 50 euros tout de même, mais rien en comparaison du vol possible de l'appareil photo, du minidisc, du caméscope, de l'ordinateur, bref de tout le matériel qui me permet de travailler pendant mon séjour...

Je vais passer mon samedi soir à dormir, après avoir fini deux articles que j'enverrai dimanche matin à Paris.

+ de carnets de routes en ligne...

-- Sebastian Alzerreca zoul@no-log.org http://www.zoulstory.com

Version imprimable | Mouvements | Le Vendredi 27/10/2006 | Lu 970 fois



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