Le
Réseau éducation sans frontières tient à adresser ses félicitations les
plus vives aux responsables et aux exécutants, chacun selon leur grade,
des deux faits relatés par le communiqué de l’ANAFE et par l’article
de Dernières Nouvelles d’Alsace reproduits ci-dessous.
Deux
jeunes hommes, victimes de persécutions dans leur pays, ont été
renvoyés à leurs bourreaux car, selon la sentence favorite du ministre
de l’Intérieur, « ils avaient vocation à être reconduits dans leur pays
». Ce qui a été fait. Issa est en prison au Tchad, Elanchelvan a été
exécuté par l'armée sri lankaise..
A Marseille, un jeune kurde de 19
ans, risque de mourir, tabassé et drogué à chacune des expulsions
qu'il refuse (Il y a déjà eu deux tentatives et une troisième est
prévue demain), en grève de la faim depuis une semaine et partiellement
(les premiers jours et de nouveau ) en grève de la soif. Il ne tient
plus debout et ne reçoit pas de soins, mais il ne veut pas rentrer en
Turquie où son père a déjà été en prison et où il sera enfermé comme
déserteur et kurde....
Ces derniers jours l'OFPRA et le ministère de
l'intérieur ne cachaient pas leur satisfaction de voir le nombre de
réfugiés diminuer de façon spectaculaire (-38%). Selon eux, grâce aux
réformes énergiques de ces dernières années, les « faux » réfugiés
seraient, soit dissuadés d'arriver sur le sol français, soit traités
sans faillir (92% de rejet) et expulsés. Force est de constater que la
belle mécanique de cette machinerie administrative et policière ne
s'embarrasse guère des pertes humaines. Mais les responsables
politiques continueront sans doute à promettre la main sur le cœur que
la France restera une « terre d'asile ».
Ces victimes de la
politique de démagogie anti-immigrés ne sont pas des enfants. Ils n’ont
jamais été scolarisés en France. Mais la situation dans laquelle les
autorités françaises les ont plongés concerne tous les élèves, tous les
enseignants et tous les parents de ce pays et donc le RESF pour la
honte que suscitent de tels événements. Le RESF invite les enseignants
et les parents d’élèves à les commenter auprès des jeunes. Chacun doit
mesurer les conséquences d’une politique qui piétine dans les faits le
droit d’asile établi par la Convention de Genève et fait de ses
initiateurs les complices indirects des assassins et des tortionnaires
vers lesquels on renvoie les réfugiés déboutés.
Monsieur
Sarkozy ânonne après Monsieur Le Pen « La France, on l’aime ou on la
quitte ». Il y a erreur, Monsieur Sarkozy n’aime pas, il souille.
Communiqué de l’Anafé -- Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers :
Demandeur d'asile tchadien refoulé par la France, aujourd'hui emprisonné à N'Djamena.
Le 15 mars 2007
Au
moment de la publication du rapport 2006 de l'OFPRA constatant une
baisse de 38% du nombre de demandes d'asile en France par rapport à
2005, dont le ministre de l'Intérieur ne cesse de se féliciter, voici
le cas d'Issa.
Issa arrive à l'aéroport de Roissy le 24 février
2007, il demande aussitôt l'asile à la frontière. Il explique, par un
récit précis et circonstancié, qu'il fuit les services de
renseignements d'Idriss Deby qui ont fait procéder à une vague
d'arrestations au sein du groupe rebelle qu'Issa venait de rejoindre.
Sa demande d'asile est examinée par la division asile à la frontière de
l'OFPRA durant son maintien en zone d'attente, puis rejetée par le
ministère de l'Intérieur le 27 février 2007 qui estime qu'elle est «
manifestement infondée ».
Après avoir refusé deux fois d'embarquer, Issa est refoulé sous escorte policière le 6 mars 2007. Direction N'Djamena.
Son
frère, réfugié statutaire en France, reçoit un appel téléphonique le
lendemain. C'est Issa, il est détenu au commissariat de N'Djamena et
utilise le téléphone portable d'un codétenu. Il explique qu'à son
arrivée à l'aéroport de N'Djamena, il s'est fait appréhender par la
police tchadienne qui l'a gardé pendant 5 heures, lui faisant subir un
interrogatoire « musclé » portant notamment sur sa demande d'asile en
France avant de le transférer au commissariat.
La Ligue tchadienne des droits de l'Homme a pu vérifier qu'Issa se trouvait bien au commissariat central de N'Djamena.
Les
dernières nouvelles que nous avons eues d'Issa datent du 13 mars : il
était très affaibli car privé de nourriture et aucune procédure ne lui
avait été notifiée, l'empêchant ainsi d'avoir accès à un avocat.
Nous craignons désormais de perdre toute trace de lui.
L'Anafé
dénonce la violation par la France du principe de non-refoulement de la
Convention de Genève. La simple lecture de la décision du ministère de
l'Intérieur démontre que le strict examen du caractère «
non-manifestement infondé » a été largement dépassé.
L'Anafé demande que toute la lumière soit faite sur les conditions du refoulement de l'intéressé.
L'Anafé
a demandé au gouvernement français d'intervenir rapidement auprès du
gouvernement tchadien afin d'éviter le pire pour Issa.
Article paru dans les DNA du 16 03 07 / Faits divers - Strasbourg
Débouté du droit d'asile, expulsé, tué par balles
Arrivé
en France en 2002 pour fuir les persécutions dont il était victime au
Sri Lanka, Elanchelvan Rajendram a eu moins de chance que les membres
de sa famille déjà réfugiés à Strasbourg. Débouté du droit d'asile en
2003, il s'est trouvé sans plus aucune voie de recours en 2004. Il a
été expulsé vers le Sri Lanka en août 2005. Membre du Casas (*), Simone
Fluhr l'avait accompagné dans ses démarches successives. Ils avaient
sympathisé. Elle l'avait regardé partir la mort dans l'âme : « Nous
voyons passer beaucoup de Sri Lankais d'origine tamoule. Nous savons ce
qu'ils endurent. L'oncle d'Elanchelvan installé à Hautepierre a été
torturé en détention. Le certificat médical qui décrit les séquelles
fait trois pages. » Pour le nouvel an 2006, Simone a pourtant eu la
surprise de recevoir une carte de voeux d'Elanchelvan, avec des petits
coeurs et des roses de toutes les couleurs. Elle a appris sa mort la
semaine dernière. Le 28 février à l'aube, le jeune homme est tombé, le
corps criblé de six balles. Exécuté par les militaires de l'armée
sri-lankaise alors qu'il sortait des toilettes installées dans la cour
de sa maison. Vêtu d'une simple étoffe et désarmé, Elanchelvan a rendu
son dernier souffle dans les bras de sa femme. Sous l'oeil goguenard de
ses assassins.
« Je savais qu'il serait en danger au Sri Lanka »
C'est
David Balathas, un des amis d'Elanchelvan réfugiés à Strasbourg, qui a
contacté Simone pour lui raconter. Dans son magasin de retouches du
quartier des Halles, il retient encore ses larmes, une photo de son ami
disparu posée sur la table. « Je savais qu'il serait en danger là-bas.
Il avait déjà perdu deux frères. Et l'un d'eux était membre des
Tigres-tamouls (**), appuie David. Je ne comprends pas pourquoi l'Ofpra
(***) ne l'a pas cru. » Ebranlée, la famille vient d'envoyer, avec
l'aide du Casas, un faire part de décès aux organismes intervenus dans
le traitement du « dossier » d'Elanchelvan : l'Ofpra, la Commission de
recours des réfugiés, la préfecture du Bas-Rhin, la Police aux
frontières, etc. « Il ne s'agit pas de les culpabiliser. Mais de
rappeler que, dans le cas de personnes victimes de persécutions,
l'expulsion peut être synonyme de mort », précise Simone. Elanchelvan
avait 30 ans. Il laisse derrière lui son épouse et une petite fille
âgée de trois mois ainsi que des parents brisés par la perte de leur
troisième et dernier fils.
Manuel Plantin
(*) Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg.
(**) Le LTTE est une organisation indépendantiste tamoule en lutte depuis 1972 contre le pouvoir cinghalais.
(***) Office français de protection des réfugiés et apatrides.
© Dernières Nouvelles d'Alsace: <http://www.dna.fr/> - 16.3.2007
à bientôt,
MR
getmr@wanadoo.fr
16/03/2007
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