Bon,
Encore du pipo à intox en grand. Bien sûr pour que cela passe, faut
quelques touches de réalisme. Une recette parmi d'autre, trouvez dans
la bouche des autochtones, les djeuns, les mots d'ordre de la
concurrence pour les rendre plus naturels et évidents encore.
Par exemple, risquons une question choc (cf ci bas) : «Qui ose dire
qu'il y a l'égalité des chances en France ?».
Avec elle vient, en
contrebande, la doxa barbare de notre post modernité, ces conneries
incroyables que les mouvements de l'an dernier ont si peu remis en
cause dans leurs énoncés.
Ben oui quoi, c'est sûr, le fonctionnement de cette société ne
ressemble pas encore assez au loto, c'est scandaleux qu'il y ai
encore des déterminations qui ne soient pas purement aléatoires,
également réparties.
Si on joue, c'est pour gagner (n'est-ce pas ce
qui compte ?), chacun contre tous. It' more fun to compete.
Et puis «En France, on a peur...." de quoi ? pas d'être jeté à la
rue, pas de devoir subir la non indemnisation du chômage ou
l'interdiction du RMI, pas d'être contraint pour survivre d'accepter
un taff dans les services avec des horaires en coupure qui vous
détruisent la vie pour trois cacahuetes, non, peur " de fonctionner
au mérite". Le mérite, ça égaliserait, ça rassurerait, ben voyons.
(C'est quand même bizarre: soyons grossiers, mécaniquement
l'agitation du corps social entraîne un apport d'oxygène qui stimule
le cerveau collectif, que s'est-il passé pour que les mêmes
absurdités persistent, incontestées ? comment comprendre la tactique
du silence en octobre novembre 2005, le choix du semblant au
printemps 2006, ce que ces gestes impliquent, ce qu'ils peuvent
préparer pour la suite ?)
Pour faire mousser son papier, organiquement solidaire de l'ordre
social, le plumitif n'hésite pas, filons vers le ciel étoilé de la
représentation : 'Sarkozy n'aurait sans doute pas proposé, dimanche,
que tous les jeunes reçoivent une allocation de formation de 300
euros par mois '... peu importe qu'à regarder l'annonce, la mesure
évoquée n'ait rien de général, Madame Royal fera mieux, une alloc
d'autonomie et 10 000 euros...
Il y a quelques jours un gratuit titrait en une "23 000 euros pour
démarrer dans la vie", une bonne manière d'intéresser le lecteur.
S'agissait juste des propositions formulées par le centre d'analyse
stratégique, d'endetter les entrants dans le salariat pour mieux les
y enchaîner.
Bref, on le savait, si nous sommes dans le caniveau c'est, aussi, la
faute des journaux.
un autre point de vue que la mélasse mass-médiatique sur cette
question :
"Intégrer les jeunes au droit commun : lever l’interdiction du RMI.
"
AC ! - printemps 2002
http://www.ac-reseau.org/spip.php?article486
ciao,
l.
http://www.liberation.fr/actualite/societe/229285.FR.php
Jeunes : Génération courtisée
Antoine, 25 ans, stagiaire
Jonathan, 27 ans, à la recherche d'un emploi
«Une dépendance à l'égard des parents»
La planète étudiante en attente
Caroline, 23 ans, au chômage
Mounia, 21 ans, étudiante en master de finances
Emmanuelle, 25 ans, chef de projet marketing
Bastien, 22 ans, en CDD
Jeunes : Génération courtisée
Un an après le CPE, les présidentiables font leur proposition à une
tranche d'âge touchée par la précarité, qui peine à s'intégrer.
Par François WENZ-DUMAS
QUOTIDIEN : jeudi 18 janvier 2007
Et si le fiasco du CPE était la meilleure chose qui soit arrivée aux
jeunes ? Un an après le lancement par Dominique de Villepin du
Contrat première embauche, suivi, quatre mois et quelques centaines
de milliers de manifestants plus tard, par son retrait sans
condition, aucun des candidats à l'élection présidentielle ne peut
défendre un programme où ne figurerait pas un dispositif d'aide à la
formation et à l'insertion professionnelles des jeunes. Depuis six
mois, le Centre d'analyse stratégique (ex-Commissariat au plan)
planche sur le sujet.
Sans le lamentable échec politique du CPE, Nicolas Sarkozy n'aurait
sans doute pas proposé, dimanche, que tous les jeunes reçoivent une
allocation de formation de 300 euros par mois et puissent bénéficier
de prêts à taux zéro. Et Ségolène Royal se serait sans doute
contentée de reprendre l'idée de l'allocation d'autonomie qui figure
dans le projet socialiste, sans envisager de compléter la mesure par
un prêt gratuit de 10 000 euros alloué aux jeunes pour un projet ou
une formation.
Si les équipes de campagne des candidats veulent enrichir leur
catalogue de promesses, elles pourront puiser dans le rapport sur
«les dotation initiales des jeunes en capital» que le Centre
d'analyse stratégique doit remettre avant le 15 février au Premier
ministre.
«Ce qui nous a d'abord frappés , souligne sa directrice
générale, Sophie Boissard, c'est la faiblesse de l'effort de
solidarité en France vers les jeunes. On a fait beaucoup ces
dernières années pour la protection sociale des plus âgés, mais très
peu pour les jeunes.»
Ce rapport ne proposera pas de solutions clés en main, mais évaluera
et chiffrera les différents modèles expérimentés depuis une quinzaine
d'années dans différents pays. «Il existe deux grandes familles
d'aides aux jeunes , résume Julien Damon, chargé de le coordonner,
les dotations en capital, et les droits de tirage alloués pour un
projet de formation. Dans la première catégorie, on peut distinguer
les dotations universelles, allouées à tous les jeunes nés dans le
pays comme le child trust found britannique, et les dotations
ciblées, réservées aux jeunes issus de familles à faibles revenus.»
En France, le coût minimal d'un dispositif est estimé à 2 milliards
d'euros, soit 5 % du montant total des prestations familiales.
Le Centre d'analyse stratégique ne devrait pas se contenter de
dresser un état des lieux, il doit faire une proposition mixant
plusieurs modèles. L'aide aux jeunes serait à la fois ciblée et
universelle. L'idée est d'allouer à chacun une somme utilisable à la
majorité, aussi bien pour des formations que pour définir une aide au
logement ou à la création d'entreprise. D'un montant théorique de 23
000 euros, elle ne serait pas versée en capital mais disponible sous
forme d'aide directe ou d'un prêt garanti et bonifié. La proportion
entre l'aide et le prêt serait fonction du niveau de revenus des
parents.
A savoir
19 millions. C'est le nombre de jeunes de moins de 25 ans recensés en
France en 2006, par l'Insee.
63 % des jeunes non qualifiés commencent par un emploi temporaire,
une situation également vécue par 40% des diplômés du troisième cycle
Durée des études. Entre la fin des années 80 et la fin des années 90,
le durée de scolarité s'est accrue d'au moins 2,2 années pour les 10
% des élèves qui ont été le plus longtemps à l'école, et 1,2 année
pour les 10 % qui ont connu le parcours le plus court.
21% des jeunes actifs occupent un emploi temporaire (contre 7,2% des
30-49 ans et 4% des 50-64 ans), et 18,1% des jeunes actifs sont au
chômage (contre 8,2% des 30-49 ans et 7% des 50-64 ans
SOCIAL.
Cécile Van de Velde, sociologue, décrypte le système
français, très familiariste :
«Une dépendance à l'égard des parents»
Par Fabrice TASSEL
Cécile Van de Velde est maître de conférence en sociologie à
l'université de Lille-III. Elle vient de publier «La dépendance
familiale des jeunes adultes en France» dans l'ouvrage collectif
Repenser la solidarité (éditions PUF) dirigé par Serge Paugam.
Qu'est-ce qui caractérise la politique publique en France à l'égard
des jeunes ?
Le modèle français est assez composite avec une forte tendance à
consacrer le rôle de la famille dans la prise en charge de cette
période. Cela apparaît, par exemple, au travers du seuil d'âge
d'accès au RMI, fixé à 25 ans alors que dans des pays du nord de
l'Europe ce revenu minimum peut être obtenu dès 18 ans. Le système
des allocations familiales témoigne de cette même logique consistant
à aider d'abord les parents. C'est le cadre de pensée politique :
aider les enfants jusqu'à 25 ans et l'intégration sociale de fait. La
difficulté c'est que culturellement en France la norme n'est pas si
familialiste que cela. Cette relation de dépendance des enfants par
rapport à leurs parents est souvent vécue de façon contrainte par les
jeunes qui revendiquent une autonomie assez forte. Or, l'accès à
cette indépendance est très long. Le phénomène Tanguy [film dans
lequel un fils de 28 ans vit au domicile familial, ndlr], qui reste
chez ses parents par choix, n'est pas du tout caractéristique du
système français.
Les propositions du Centre d'analyse stratégique traduisent-elles une
plus grande volonté d'autonomiser les jeunes ?
Oui, l'allocation autonomie, qui serait versée dès 18 ans, sort de ce
cadre familialiste. Mais il reste quand même un aspect typiquement
français. Ainsi, une des propositions évoque une dotation qui
dépendrait des revenus des parents. Dans le nord de l'Europe, lorsque
les individus arrivent à la majorité, on ne prend plus en compte
leurs origines économiques, tous les étudiants perçoivent la même
allocation. Ce modèle universaliste existe au Danemark où, dès 18
ans, un étudiant reçoit 1 000 euros mensuels grâce à des bourses ou
des prêts couverts par l'Etat, et pendant six ans. L'autre intérêt de
ce système danois est la flexibilité temporelle, puisque l'individu
peut utiliser trois années de bourse pour suivre ses études,
commencer à travailler, puis reprendre des études à 27 ans en
bénéficiant toujours d'aides. Cela permet des parcours très mobiles,
et une jeunesse beaucoup plus insouciante que les Français. Le
système anglais aussi est basé sur des études courtes et
autofinancées par des prêts. Les jeunes Anglais évoluent dans une
norme d'indépendance plus forte que la nôtre, ils se sentent presque
coupables de demander de l'aide à leurs parents.
Pourquoi l'accès à l'indépendance est-il si long ?
Le modèle français souffre d'une logique où l'on est déterminé très
tôt par les études. Le diplôme que l'on va obtenir va rigidifer
l'avenir professionnel. Dans un contexte de chômage fort cela génère
de l'angoisse. Les jeunes vivent avec un sentiment du «pas le droit à
l'erreur», d'où un investissement important dans les études, et une
forte dépendance à l'égard des parents puisque l'Etat les aide peu.
Cette contrainte est acceptée par l'enjeu énorme que représentent les
études.
Finalement, le temps de la jeunesse semble isolé du reste de la vie...
Tout à fait. Il existe un cloisonnement du temps des études et du
temps de l'emploi. Peu d'étudiants travaillent en parallèle de leurs
études, sauf pour survivre via des boulots d'appoint. 16-25 ans est
une période de placement social. Les contrats aidés apparaissent
d'ailleurs comme des moyens de retarder l'âge de l'entrée sur le
marché de l'emploi. Mais la réaction contre le CPE a montré que les
jeunes ne veulent plus de cette logique de seuil d'âge. Le vrai
capital serait d'offrir une expérience professionnelle. Toute mesure
qui peut améliorer l'accès à l'emploi pendant les études est
intéressante. Il faut arrêter de compacter les études sur les
premières années de la vie.
La planète étudiante en attente
Unanimes sur le diagnostic, les syndicats sont divisés sur les remèdes.
Par Véronique SOULE
«C 'est bien que la crise du CPE ait mis la question de la précarité
de la jeunesse sur le devant de la scène. Mais les propositions qu'on
entend méritent qu'on y regarde à deux fois.» Floréale Mangin,
présidente de l'UNL (Union nationale des lycéens), résume le
scepticisme ambiant. Ravies que les problèmes de la jeunesse soient
au coeur de la campagne, mais peu consultées par les candidats, les
organisations de jeunesse entendent peser dans le débat, soucieuses
d'obtenir de vrais engagements plutôt que des promesses démagogiques.
Endettement . « Ségolène Royal nous a franchement déçus avec
l'annonce de son prêt gratuit de 10 000 euros» donné à tous les
jeunes de 18 ans, explique Bruno Julliard, président de l'Unef, le
syndicat étudiant très en pointe durant la crise du CPE. « On l'a vu
en Grande-Bretagne : les frais d'inscription ont augmenté très vite,
les prêts aussi, du coup le jeune diplômé arrive sur le marché du
travail très endetté. Ensuite ce sont les plus pauvres qui hésitent à
s'endetter, et l'on arrive ainsi au résultat inverse de celui
escompté : on aggrave la précarité.»
L'Unef milite pour une allocation d'autonomie universelle, qui irait
à tous les jeunes de 18 à 25 ans. «La mesure figurait dans le
programme du PS», regrette Bruno Julliard. Selon l'Unef, les aides
vont aux étudiants les plus défavorisés par le biais des bourses
allouées sous conditions de ressources, mais aussi indirectement aux
plus aisés par le biais de la demi-part fiscale dont bénéficient les
parents si l'étudiant est à la maison. Les classes moyennes sont
ainsi oubliées du filet social. L'Unef propose dès lors de supprimer
ces aides éparses évaluées à 7 milliards d'euros au profit d'une
allocation mensuelle, mesure estimée à 15 milliards.
«Pudding indigeste». Le débat, où deux visions s'affrontent, est très
politique. Selon la première vision, l'enseignement est un service
public, il est donc du devoir de l'Etat de donner à chacun les moyens
de réussir. « Ce n'est pas à l'étudiant de prendre en charge sa
formation, mais à chacun d'y contribuer, assure Bruno Julliard. La
France a besoin de gens formés, la société tout entière en
bénéficiera ». A l'opposé, l'autre vision privilégie la réussite au
mérite, chacun devant se prendre en charge et faire ses preuves.
«Depuis les plans sociaux étudiants de Jack Lang et de Claude Allègre
[ministres socialistes de l'Education, ndlr], on n'a cessé d'ajouter
des mesures. Résultat, notre système d'aides sociales est devenu un
pudding indigeste, coûteux et inefficace», assène Olivier Vial,
secrétaire général de l'UNI, le syndicat étudiant proche de l'UMP.
Hostile au prêt proposé par Ségolène Royal, l'UNI défend un prêt «
personnalisé ». «Dans une filière où les débouchés professionnels
sont nombreux, un prêt ne poserait pas de problème, quand les
débouchés sont hasardeux, ce serait plus difficile», explique Olivier
Vial qui plaide pour la publication par les universités des taux
d'insertion professionnelle des différentes filières. Comme en
Nouvelle-Zélande, l'étudiant rembourserait son prêt dix ans plus
tard, au prorata de son salaire.
Paliers de ressources. Hostile aussi à l'allocation d'autonomie «
attribuée par l'Etat, elle ne donnerait pas une vraie autonomie» ,
Thiébaut Weber, président de la Fage, syndicat étudiant de droite
modérée, estime que le problème est ailleurs : «Comment l'étudiant
peut-il acquérir son autonomie par lui-même ? S'il est amené à
travailler pour faire ses études, il faut faire en sorte qu'il ne
soit pas pénalisé.» Pour la Fage, favorable à une refonte des aides «
qui n'ont pas bougé depuis la massification » de l'enseignement
supérieur, le calcul des bourses devrait se faire non plus
exclusivement sur le revenu des parents mais sur celui des étudiants
lorsqu'ils travaillent.
La plupart des organisations prônent une réforme du mode
d'attribution des bourses avec la suppression des paliers de
ressources : trop souvent, des jeunes se retrouvent exclus parce que
leurs parents gagnent un euro de trop.
Bastien, 22 ans, en CDD
«Tu entres dans la vie active en payant pour travailler»
Par Adrien MAJOUREL
Récemment diplômé d'une école de commerce qu'il a financée par une
année d'apprentissage et un prêt, Bastien ne regrette pas ses choix
mais reconnaît que démarrer dans la vie active avec ce passif est un
handicap. Issu des classes moyennes, il ne bénéficiait pas de bourses
et ce prêt a été un mal nécessaire. «Lorsque tu as un prêt à 22 ans,
comment veux-tu accepter un stage?» Alors, il enchaîne les missions
d'intérim et les CDD, et a dû retourner vivre chez ses parents en
banlieue parisienne.
Amer, il pense que l'école est un monde bercé d'illusions: «On te
fait croire que tu fais partie d'une élite alors que davantage que ta
formation, c'est le statut social de tes parents qui t'amène à faire
partie de l'élite ou pas. Sans expérience ni réseau, on ne te propose
que des stages. Quel paradoxe ! Tu entres dans la vie active en
payant pour travailler. Donner un capital à chaque enfant pour
assumer sa scolarité est une bonne idée mais cela ne résoudra rien.
L'inégalité doit se combattre bien plus tôt.» Bastien tente de
positiver: «Ceux qui n'ont pas de problèmes sont moins confrontés à
la réalité et le choc de l'entrée dans la vraie vie n'est pas
comparable.» Mais il songe quand même à quitter la France pour tenter
sa chance à l'étranger où «les réseaux et les diplômes ne font pas
tout». Il est déjà parti en Irlande, un voyage qu'il a dû financer en
travaillant dans un fast food . «Mais il ne faut pas non plus
exagérer, on est assez bien lotis en France mais de nombreuses choses
sont à revoir, dont l'abus des stages.»
Antoine, 25 ans, stagiaire
«A l'école, on est en complet décalage avec le marché»
Par Adrien MAJOUREL
Antoine en est à son sixième stage. Depuis sa sortie d'une école de
commerce, il y a trois ans, il gagne 350 euros par mois et squatte
chez des amis. Ses parents le soutiennent car même trouver un
logement, «c'est le Far West, il faut trouver le temps, enchaîner les
visites et cacher son statut de stagiaire. Je dis que je suis
étudiant et que mes parents se portent garants» . Antoine est
critique sur un système éducatif trop éloigné, selon lui, des
réalités du marché. «A l'école, on est en complet décalage avec les
attentes du marché. On te fait miroiter un monde où tout est
possible, tu t'orientes vers les domaines qui te plaisent, or il est
impossible de trouver un emploi stable. Reste les stages qui ne
coûtent rien à l'entreprise».
Caroline, 23 ans, au chômage
«En France, on a peur de fonctionner au mérite»
Par Adrien MAJOUREL
Caroline est sur le marché du travail depuis quinze jours. Elle a
fait sept stages, refuse d'en faire d'autres. Après un bac ES, une
année de LEA puis un IUP en communication, elle est partie l'année
dernière en Erasmus à Madrid pendant un an, année qu'elle a financée
avec des bourses et la rémunération des cours de français qu'elle a
donnés. Cette année fut pour elle le premier vrai pas vers
l'indépendance. «J'ai toujours voulu être autonome et c'était la
garantie de rapports plus sains avec mes parents», se félicite
Caroline. Elle déplore que la plupart des offres requièrent au moins
trois ans d'expérience. «C'est le paradoxe de notre génération : sans
expérience personne ne te veut. Mais comment fait-on pour la première
fois ?»
Concernant les aides aux jeunes, elle pense que «le rôle des parents,
pour ce qui est de l'orientation et surtout des réseaux, est crucial.
Sans piston, tu n'as pas accès aux meilleurs postes ». Caroline
estime aussi que «donner un capital à 18 ans, c'est une bonne idée,
mais il n'y a pas que l'aspect financier. Il faut surtout que le
système éducatif accompagne ceux qui n'ont pas la chance d'avoir des
parents qui connaissent les bonnes formations, cela atténuerait les
différences de réseaux entre les gens». Habituée à se battre, la
jeune femme assène «qu'en France on a peur de fonctionner au mérite
alors que cela créerait sûrement une émulation et permettrait aux
plus méritants de poursuivre leurs études décemment».
Mounia, 21 ans, étudiante en master de finances
«L'éducation se paye et le supérieur se paye très cher»
Par Adrien MAJOUREL
Mounia est en master de finances à Dauphine. Cette jeune fille
brillante ne reçoit aucune aide de sa famille. Pour financer ses
études, elle multiplie depuis ses 17 ans les gardes d'enfants le soir
et les petits jobs le week-end. Vivant «encore» chez ses parents,
elle parle du désir d'indépendance comme d'un «moteur» qui lui a
donné l'envie de se battre. «Je ne pense qu'à ça : pouvoir mener ma
vie comme je le souhaite.» L'égalité des chances relève, selon elle,
de l'utopie car «plus on avance dans les études et moins les couches
populaires sont présentes». Les apparences sont trompeuses, ajoute-t-
elle. L'éducation se paye et le supérieur se paye très cher. Je
dépense la moitié de ma bourse rien qu'en bouquins et en transports.
L'ordinateur portable est indispensable et rien que ça, ça entretient
des clivages. Et je ne parle même pas de tout ce que font mes copines
et que je ne peux pas faire.»
Mounia se dit aussi «consciente de la chance qu'on a en France mais
l'inégalité commence dès la maternelle quand tes parents ne te
demandent pas ce que tu as fait la journée» . Selon l'étudiante, les
projets d'aide aux jeunes représentent «une très bonne idée car
préparer tous les jeunes à affronter la réalité est un devoir d'Etat,
mais ça ne résoudrait en rien l'inégalité, ceux qui ont des parents
derrière auront toujours un avantage» . Mounia pense aussi que les
entreprises disposent d'assez d'options pour embaucher des jeunes :
«Il faut arrêter l'hypocrisie des stages non rémunérés. Les
entreprises seront obligées de proposer de véritables contrats.»
Emmanuelle, 25 ans, chef de projet marketing
«Il faut être très motivé pour financer ses études»
Par Adrien MAJOUREL
Emmanuelle vient d'être embauchée comme chef de projet marketing.
Elle a depuis très longtemps éprouvé le besoin de dépendre le moins
possible de ses parents. Pour financer ses années d'études en fac
d'économie et son échange Erasmus à Saragosse, elle s'est uniquement
reposée sur des bourses et sur les petits boulots d'été. Mais
lorsqu'elle a voulu envisager un master, elle s'est heurtée à un
obstacle financier. Elle a donc tout arrêté pendant un an pour
financer son projet en travaillant comme surveillante de collège.
Le meilleur avantage qu'elle reconnaît au système éducatif français,
«c'est le fait de pouvoir partir en échange facilement» . Emmanuelle
a ainsi cumulé plusieurs bourses et son année en Espagne ne lui a
rien coûté. «C'est une opportunité que tout le monde devrait saisir.
J'ai connu moins de problèmes financiers que si j'étais restée et
l'expérience a été unique.» Même si elle a d'excellents rapports avec
ses parents, elle éprouve depuis bien longtemps le besoin de partir
de chez eux, pour «avoir [son] appartement et pouvoir gérer [sa] vie
toute seule sans avoir besoin de rendre de comptes». En ce qui
concerne l'égalité des chances, Emmanuelle pense que le fait de
donner un capital aux jeunes est une bonne idée, sans grande
efficacité toutefois si l'accompagnement des jeunes n'est pas lui
aussi revu. «Si tu n'es pas poussé par tes parents il est très dur de
savoir où aller. Financer ses études est possible pour ceux qui sont
très motivés. Mais la différence se fait bien avant.»
Jonathan, 27 ans, à la recherche d'un emploi
«Qui ose dire qu'il y a l'égalité des chances en France ?»
Par Adrien MAJOUREL
QUOTIDIEN : jeudi 18 janvier 2007
Parti du domicile familial à l'âge de 17 ans, Jonathan entrera sur le
marché du travail dans quelques jours. Son parcours, qui l'a fait
passer de la médecine à l'expertise-comptable, a été financé à 100 %
par ses parents. Dix ans d'assistance pendant lesquels il n'a jamais
travaillé. «Ma situation m'a surtout permis de prendre le temps de
choisir, de comprendre dans quels domaines je pourrais le mieux
exploiter mes compétences.» Conscient de ce luxe, il reste réaliste :
«Qui ose dire qu'il y a égalité des chances en France ? Même pour
moi, trouver un logement c'est la galère.» Reconnaissant à l'égard de
ses parents, il veut désormais travailler «pour que [ses] enfants
soient directement au bon étage de l'ascenseur social» .
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