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Edition du 29 novembre 2006 > Actualite
Cela ressemble au danger montant de la fonte des icebergs. Les spécialistes appellent cela « l’hiver démographique ». Mis à part Chypre et Malte, tous les pays membres de l’Union européenne connaissent une baisse régulière de la population.
La Commission européenne a, en 2005, élaboré un Livre vert sur « les changements démographiques ». « L’apport de l’immigration est devenu crucial pour assurer une croissance de la population. Le taux de fertilité est partout inférieur au seuil de renouvellement des générations (environ 2,1 enfants par femme) ; il est même tombé en dessous de 1,5 enfant par femme
dans de nombreux Etats membres », est-il écrit dans ce rapport. Jusqu’à 2025, la population européenne va croître faiblement grâce à ... l’apport de l’immigration. Elle ne va évoluer que de dix millions en vingt ans. Ce qui n’est pas en mesure d’assurer une croissance économique durable surtout que le nombre des retraités est en augmentation. « Ce déclin est plus rapide et
plus profond si l’on ne considère que la population totale d’âge actif (les 15-64 ans) : entre 2005 et 2030, elle devrait perdre 20,8 millions d’individus », est-il constaté dans le Livre vert. Freiner le déclin démographique passe, selon les experts, par l’encouragement de politiques publiques permettant « aux femmes et aux hommes de concilier vie familiale et vie
professionnelle ». Mais également, par l’encouragement de flux migratoires.
Sauf qu’ici, à Bruxelles, personne parmi les hauts responsables européens ne parle de cette manière. De l’immigration oui, mais laquelle ? L’Italien Francesco Luciani, de la direction justice et sécurité à la Commission européenne, va même à contresens de toutes les propositions faites par les spécialistes. « Ce n’est pas parce que la démographie est négative que l’immigration est la solution », dit-il. Citant l’expérience tentée en Allemagne, il affirme qu’il est possible de « renverser » la vapeur. Amener les gens à faire des enfants ? « Il y a des solutions », dit-il sans convaincre. Il ne croit pas trop à « la politique des quotas » défendue par l’Italie avec des pays comme la Tunisie, l’Espagne avec le Maroc. L’Allemagne, par la voix de son ministre de l’Intérieur, Wolfgang Schduble, est hostile à l’idée de quotas d’immigration fixés à l’échelle européenne. « Nous sommes attentifs à ce que les quotas restent la compétence des Etats, car ils ne peuvent être fixés qu’en fonction de la situation du marché du travail dans chaque pays », a-t-il dit. L’Allemagne ne semble pas partager le point de vue de Franco Frattini, vice-président de la Commission européenne chargé de la sécurité, des libertés et de la justice, qui fait campagne pour ... « la politique des quotas » pour l’immigration légale. A ses yeux, il est important que la Commission européenne connaisse les besoins de chaque Etat membre de l’UE pour pouvoir engager des négociations avec des pays tiers afin d’ouvrir les frontières à des travailleurs, à titre provisoire ou permanent.
« Brain drain »
En 2007, l’UE lancera un vaste plan, dont l’élaboration sera coordonnée avec l’Afrique, y compris l’Algérie, pour un mouvement d’immigration économique.
Un portail d’information sera mis à la disposition des pays africains : European job mobility portal. Y seront expliquées et détaillées les opportunités d’emploi sur le Vieux continent. C’est une sorte de variante « d’immigration choisie » défendue par le ministre français de l’Intérieur et une partie de la droite française. Le terme « immigration choisie » suscite l’allergie à Bruxelles, mais le plan Frattini a tout l’air de lui ressembler. C’est que l’Europe veut ouvrir ses bras à de la main-d’œuvre qualifiée, de haut niveau s’il le faut. « On s’est rendu compte que les personnes à niveau de formation supérieure préfèrent immigrer au Canada et aux Etats-Unis. Alors que ceux qui débarquent en Europe sont ceux qui souvent n’ont aucune qualification », observe un responsable à la Commission européenne. A Tripoli, en Libye, où s’est tenue une conférence commune Afrique-Europe sur l’immigration, le 23 novembre 2006, Franco Frattini a prévenu contre « les risques et les conséquences » de la fuite des cerveaux.
Cependant, il n’a pas expliqué la manière avec laquelle ce risque sera neutralisé d’autant plus que les pays du Maghreb, sans que cela secoue les gouvernements en place, se « vident » de leurs cadres. Les pertes liées à la fuite des personnes qualifiées sont, pour l’Afrique, estimées à plus de 35 milliards de dollars, selon une étude de l’Unesco. Et le phénomène ne cesse de s’aggraver. En plus du brain drain (fuite des cerveaux), ces départs de travailleurs qualifiés freinent, d’après une analyse de l’Institut français du développement durable et des relations internationales, la croissance et amoindrissent le potentiel de production. Fidèle à son image de grosse machine bureaucratique, l’Union africaine ne semble pas trop s’inquiéter de cette situation dramatique. En face, l’Europe a, à titre d’exemple, lancé un grand programme de recherche dans le domaine des technologies de l’information et des communications qui s’étale jusqu’à 2013. Doté de 9 milliards d’euros,
ce projet vise à donner un nouveau souffle à la compétitivité de l’Europe devant la concurrence de l’Inde, des Etats-Unis, de la Corée du Sud et de la Chine. Ce genre de projet fait appel à des compétences qui ne sont pas
nécessairement européennes. A l’heure actuelle, les visas de séjours sont prioritairement accordés aux chercheurs et aux étudiants. « En matière de délivrance de visas, la Commission européenne n’est pas aussi libre que cela », nous dit-on à Bruxelles. Si le modèle d’intégration canadien est cité en exemple (double nationalité et mouvement aller-retour), la Commission européenne entend promouvoir une stratégie pour permettre aux nouveaux migrants de s’adapter aux valeurs des pays d’accueil. En la matière, les membres de l’UE n’ont aucune cohérence. Chacun y va de son petit chemin. D’où l’attitude crispée des Pays-Bas, où se développe une xénophobie d’un autre âge, de l’Allemagne, de la France et de la Belgique.
« Nous devons détruire les barrières de non-confiance qui bloquent tout dialogue constructif et ouvert entre les sociétés d’accueil et les nouveaux arrivants », a déclaré à Tripoli, Franco Frattini. Francesco Luciani précise que l’UE est favorable à une global approach pour traiter l’immigration clandestine. Approche adoptée lors de la conférence de Tripoli où l’on a insisté sur
« l’aide au développement et sur la sécurité ». La démarche n’a encore aucune visibilité. Surtout que « le gros » du flux migratoire vers le Nord provient, en réalité, de l’Europe de l’Est, de l’Amérique du Sud et du Sud-Est asiatique.
Faycal Metaoui
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