Par AFPS PARIS-CENTRE, le 16 décembre 2006
mardi 19 décembre 2006
Depuis plusieurs mois nous savions que la Mairie de Paris et le Conseil Régional Ile de France allaient inaugurer le tramway parisien construit par Alstom. Le pôle Palestine, qui se réunit en région parisienne depuis juin 2006, a régulièrement mis ce point à l'ordre du jour. Occasion importante à ne pas laisser passer pour dénoncer la participation d'Alstom au tramway colonial de Jérusalem. En profitant de la présence des médias. Agir tout en se démarquant clairement des opposants au tramway parisien. Agir ensemble pour briser le silence complice des autorités françaises. Un tract était tiré, des pancartes et une banderole confectionnées pour le jour de l'inauguration.
Porte de Versailles, 16 décembre 2006, 10 heures trente. Il bruine sur Paris. Il y a foule sur les trottoirs. Cest aujourdhui en effet quest inauguré le tramway parisien. Le voici qui arrive, glissant sur son tapis vert. Une banderole tente dêtre déployée, des pancartes sont exhibées. Elles rappellent que la même société, Alstom, qui a produit ce bijou écologique est en train de construire, à des milliers de kilomètres de là, du côté de Jérusalem, un autre tramway. Deux réalisations identiques pour deux finalités opposées. A Paris, le tramway simplifie la ville, simplifie la vie. A Jérusalem, il traverse des terres palestiniennes pour relier Jérusalem Ouest à des colonies juives implantées en territoire occupé. Le but des autorités israéliennes nest certes pas écologique. Il nest pas de faciliter le transport des travailleurs. Elles veulent consacrer la « réunification » de Jérusalem et saccaparer de nouvelles terres palestiniennes. Lensemble de la communauté internationale, y compris les alliés les plus fidèles dIsraël, reconnaît lillégalité de lannexion de la partie orientale de Jérusalem, lillégalité des colonies. De plus, la loi internationale condamne toute personne physique ou morale qui, de quelque façon que ce soit, concourt à une entreprise délictueuse. Alstom participe donc à un forfait. En connaissance de cause, elle construit des rames qui vont rouler sur des terres volées. En connaissance de cause, elle prend sa part dans lentreprise de dépouillement à grande échelle du peuple palestinien. En tant que citoyens, soutenus par nos organisations (AFPS, CCCIPPP, GUPS, UJFP, MRAP, .) actives au sein du Collectif National pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens, nous avons voulu saisir loccasion de linauguration pour alerter nos compatriotes sur lillégalité à laquelle accepte de se conformer une grande entreprise française. Encore une fois, le droit est sans ambiguïté. Il condamne de tels agissements. Nous voulions faire entendre à nos concitoyens la voix du droit et de la justice. Nous voulions leur dire que tout nest pas permis au nom du profit. Nos armes : une modeste banderole, quelques affiches figurant notamment le tracé du tramway incriminé, quelques feuillets dexplication et un dossier de presse. Nous étions une quarantaine environ, sagement cantonnés sur le trottoir. Dès que nous avons déployé notre banderole, nous avons été chargés par les forces de lordre avec une brutalité stupéfiante, jetés à terre, bousculés sans ménagement, repoussés dans une rue adjacente, encerclés. Pour finir, vingt et un dentre nous ont été poussés dans un fourgon de police avec plus ou moins de ménagement : mise à terre, immobilisation par pression du genou dans le dos ou carrément par étouffement. Passons sur la vulgarité et le tutoiement. De nombreux caméramans, surpris par cet assaut, ont filmé la scène. Des journalistes ont interviewé des participants. Mais pour lheure cest le blackout. Rien ne filtre. Personne ne doit rien en savoir, rien ne sest passé ... Nous nous sommes ainsi retrouvés dans deux fourgons, le premier, presque exclusivement masculin, le second purement féminin. Dans une logique aux ressorts impénétrables, les deux fourgons ont convergé vers un car de police dans lequel nous avons fini par être rassemblés. La personne qui avait subi limmobilisation par étouffement a demandé en vain des soins. Une autre personne, blessée à la main, sest heurtée au même mépris. Après plusieurs contrôles didentité, le car sest ébranlé vers le Centre de Rétention de la Goutte dOr. Encore un contrôle didentité suivi dune audition où chacun apprend quil a été interpellé pour participation à une « manifestation illicite », ce que, évidemment, nous récusons. Puis nous sommes rassemblés pendant une heure dans un réduit étroit où on éprouve beaucoup de mal à tenir tous debout. Enfin, on nous appelle nominativement les uns après les autres et cest ainsi que nous retrouvons lair du dehors : il est quinze heures. La personne blessée à la main et le jeune homme à demi étranglé se sont immédiatement rendus à lhôpital. La première en ressort avec un certificat dincapacité de quinze jours. Une remarque importante : certains policiers, en nous voyant débarquer au poste de la Goutte dOr, semblaient réellement surpris. La majeure partie de la troupe était en effet constituée de gens dun certain âge, des professeurs, des avocats. Ce nétait pas vraiment le style des « visiteurs » habituels. Que lon puisse réprimer, avec une telle violence, des gens dont le tort est de vouloir utiliser leur liberté dexpression pour défendre le droit et la justice, voilà qui en dit long sur la menace qui pèse sur les libertés fondamentales. Cest sans doute cela le plus inquiétant. Que lon puisse faire vivre des heures aussi pénibles à des citoyens contre lesquels nexiste aucune charge, voilà qui doit nous rappeler que larbitraire est au coin de la rue. Voilà qui doit nous engager encore davantage à nous battre pour le droit, ici et ailleurs. AFPS PARIS-CENTRE, le 16 décembre 2006
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